Pourquoi il faut croire encore à la démocratie au Pakistan

Publié le par Bernard Kouchner, dans Le Figaro

Par Bernard Kouchner, ministre des Affaires étrangères et européennes. Le Figaro.fr 28 Décembre 

Benazir Bhutto, c'était un mélange qui n'appartenait qu'à elle d'élégance cette démarche altière, ce visage lumineux et de proximité avec le peuple. Ce peuple qui, en retour, lui vouait une véritable passion et fit d'elle deux fois un premier ministre. Et puis ce courage, cette détermination, ce mépris pour le danger dont elle était parfaitement consciente, dans une famille dont le destin a souvent croisé la mort violente… son père, ses deux frères. Je me souviens, comme beaucoup, de ses premiers mots au pied de l'avion qui la ramenait dans son pays, il y a quelques mois, quand elle disait savoir qu'elle pouvait être la cible d'un attentat dès ses premiers pas sur le tarmac. Et pourtant elle n'a pas craint de mener campagne, d'aller au devant des foules, même après le terrible carnage qui l'avait visée le jour même de son retour, en octobre. Bien sûr, je sais les reproches qui lui furent faits. Mais je préfère retenir la marque qu'elle laissera dans l'Histoire, celle d'un modèle, une femme de pouvoir aimée des siens, dans cet environnement qui ne fait pas la vie facile aux femmes.

Après cet ignoble attentat, il faut que la communauté internationale soit plus encore auprès du peuple pakistanais. Elle doit unir ses efforts pour prévenir les risques de fragmentation du Pakistan, comme l'y a appelé le Conseil de Sécurité des Nations unies dès jeudi soir. Les pays de la région, l'Afghanistan, l'Inde, l'Iran… savent qu'une déstabilisation du Pakistan est synonyme de risque majeur permanent à leur porte. Mais ce serait aussi une menace pour le monde, celle du développement d'un sanctuaire du terrorisme dans un pays qui a dans ses mains la puissance nucléaire. Quant à nous, Européens, nous devons prendre notre part du travail, ne pas faire comme si seuls les Américains étaient concernés. Le terrorisme, faut-il le répéter, c'est notre affaire à tous, de la Mauritanie au Pakistan, de l'Indonésie aux États-Unis, de l'Algérie à l'Espagne, au Royaume-Uni ou à la France. L'Allemagne, en tant que présidente du G8, avait lancé l'idée d'une initiative en faveur du Pakistan, et plus particulièrement des zones frontières avec l'Afghanistan. Sans doute faut-il rapidement mobiliser les financements nécessaires à sa mise en œuvre. Mais aussi, par exemple, lancer des programmes en faveur des jeunes du pays, notamment de formation de leurs futures élites. Nous devons à la fois appuyer le développement économique et social du pays et l'aider à lutter contre le terrorisme. C'est d'ailleurs en grande partie le même combat.

Nous devons croire à l'avènement de la démocratie au Pakistan. Ne pas y renoncer, alors que des millions de Pakistanais y aspirent et que Benazir Bhutto vient de mourir pour elle. Mais ce ne peut être un simple slogan, c'est une dynamique complexe et incertaine, qui doit être soutenue. Il faut refuser le chantage de la terreur. Les élections doivent se tenir, mais il faut aussi que les conditions le permettent. Leur sincérité sera la condition du retour au calme et à la stabilité. Pour l'instant, les autorités pakistanaises maintiennent l'échéance prévue du 8 janvier. Ce n'est pas à nous de nous prononcer sur la date. Ce ne sont pas nos élections, ce sont celles du peuple pakistanais. Notre rôle consiste à l'accompagner sur le chemin de la démocratie qu'il se choisira.

Bernard Kouchner

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Un proche d'Oussama ben Laden, qui avait facilité sa fuite en 2001 de Tora Bora dans l'est de l'Afghanistan, est détenu par les Etats-Unis, a indiqué le Pentagone, sans préciser depuis quand ni les conditions de sa capture par la CIA.Source : AFP
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En visite à Bagdad, le secrétaire américain à la défense, Robert Gates, a félicité, lundi 11 février, les soldats américains pour avoir mis en difficulté les combattants islamistes d'Al-Qaida. "Al-Qaida est en déroute (...) et la violence a été réduite de façon spectaculaire", a-t-il déclaré lors d'une brève allocution dans la capitale irakienne. "La situation reste fragile, mais le peuple irakien a aujourd'hui l'occasion de se bâtir un avenir meilleur, plus sûr et plus prospère", a-t-il ajouté. D'ici juillet, l'armée américaine prévoit de retirer cinq brigades, ramenant le nombre de soldats à 130 000, soit le niveau d'avant l'hiver 2006-2007. - (AFP.)
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Cent cinquante et un mille civils irakiens seraient morts de mort violente durant les trois années qui ont suivi l'invasion de leur pays par les Américains et les Britanniques en mars 2003, selon une vaste enquête effectuée par l'Organisation mondiale de la Santé (OMS). (Le Monde.fr avec Reuters)Ce que ne dit pas l'OMS (si l'on s'en tient à l'article), et ce que ne dit évidemment pas Le Monde, c'est que la plus grande partie de ces civils irakiens n'ont pas été tués par les américains ou les britanniques  mais bien par d'autres irakiens ou des islamistes
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M
Interrogé sur RTL au sujet de la lettre écrite par Arnaud Montebourg incitant Bernard Kouchner à démissionner, le ministre des Affaires étrangères a indiqué qu'il n'avait "pas lu le texte"."Je n'aime pas ce genre de politique. Qu'a fait ce garçon pour être aussi arrogant en politique?" s'est-il interrogé. Ou encore: "Qu’a-t-il fait en terme de politique extérieure et des Droits de l’Homme pour me donner des leçons ?"source : RTL 
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A
J'ai beaucoup aimé votre site cela vous direz t-il de mettre un lien mutuelle entre nos deux sites si vous le désirez!!!Mon blog est le suivant: http://segoleneroyal2012.over-blog.fr/ Je suis moi même de centre gauche !!!
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