Cohabitation forcée......l'alternance impossible?

Publié le par Jean-Louis Caccomo

Au soir du second tour des législatives, la messe était dite : toute application d’un programme de droite serait considérée comme « un passage en force ». Le PS perd les élections mais Mr Emmanuelli se permet de suggérer au gouvernement d’accroître le SMIC, c’est-à-dire de pérenniser les politiques dirigistes de gauche qui nourrissent précisément le démantèlement de notre économie. Ainsi, même lorsqu’elle est au pouvoir, la droite est forcée de cohabiter avec les médias, dont les sympathies pour les mouvements altermondialistes et antilibéraux ne sont jamais cachées, et avec la « démocratie sociale ».

 

Car l’entre-deux tours de ces élections législatives fut extrêmement instructif. Après le premier tour qui confirma l’élan des présidentielles, les uns et les autres ont averti. D’abord les médias qui ont savamment orchestré une alerte à la vague bleue : il suffisait d’annoncer des résultats spectaculaires pour faire passer un succès net pour un échec. Bravo l’artiste ! C'est du grand Machiavel. Car, dans les journaux, sur les ondes radios, dans les débats télévisés, on a pu entendre la lamentable complainte d’une gauche pourtant défaite, reprise en cœur par les experts en institutions politiques et les analystes politique : la démocratie serait menacée par la concentration des pouvoirs dans les mains du nouveau président. Ceux qui ont voulu le quinquennat n’avaient-ils pas prévu un tel scénario qui est, somme toute, dans la logique des choses ?

En parallèle, les « partenaires sociaux » se présentaient comme les derniers remparts de la démocratie en cas de défaite cinglante de la gauche, menaçant de prendre la rue en otage comme cela dure depuis trois décennies. Ce qui est le plus inquiétant, c’est que des appareils qui ne sont pas issus des urnes ont bien l’intention d’empêcher le gouvernement de mettre en œuvre les réformes annoncées qui forment l’armature du programme présidentiel. Quelle étrange conception de la démocratie de remettre en cause précisément un résultat qui n’est pourtant rien d’autre que l’expression des urnes ! Il est dommage que des libéraux, qui devraient être les premiers à respecter les règles du jeu institutionnelles, se soient prêtés à cette dénonciation.

 

Qu’on le veuille ou non, les français ont donné une confortable majorité au président lui-même confortablement élu. Pourquoi faudrait-il toujours que la droite s’excuse de gagner les élections quand elle les gagne proprement et nettement ? La gauche n’est-elle pas prompte à sonner le clairon lorsque les urnes lui sont favorables ? Rappelez-vous en 1981 comment les ténors de l’union de la gauche nous affirmaient que la France venait de passer de l’ombre à la lumière, légiférant tout l’été pour mettre en œuvre au plus vite le programme commun. Personne n’a dénoncé le passage en force à cette occasion…

Aux dernières élections régionales, la vague rose qui emporta la quasi-totalité des régions n’avait pas suscité les mêmes états d’âmes démocratiques. En tout cas, cette raclée a poussé la droite à méditer sur ses échecs et à ne pas répéter ses erreurs, notamment la division, ce qui fut le préalable à une reconquête du cœur des français. Je ne suis pas sûr que la gauche soit capable de méditer ce qui lui arrive aujourd’hui, persistant à résister sur des bases mauvaises. Il vaut mieux parfois une cinglante défaite qu’une lente agonie pour réussir une restructuration. De plus, la droite gagnerait à avoir en face d’elle une gauche modernisée, à l’instar des partis de gauche anglais, italiens ou espagnols qui ont d’ailleurs salué l’arrivée de Nicolas Sarkozy à l’Elysée.

 

Notre pays a souffert de ne jamais se réformer parce que les gouvernements successifs furent empêchés de gouverner. A chaque fois qu’un président a tenté de réformer, il a dû reculer de sorte que l’on ne peut jamais savoir si la France va mal parce que les réformes sont mauvaises ou parce que les réformes n’ont pas été menées à leur terme. Je ne suis d’ailleurs pas rassuré quand le président s’engage à discuter avec « les partenaires sociaux » avant de lancer le moindre projet : serait-ce une nouvelle chambre occulte chargée de contrôler le gouvernement ? Pourquoi le gouvernement s’enferme-t-il lui-même dans une cohabitation nullement légitime, au risque de créer une nouvelle déception qui sonnerait le glas du réveil de l’hexagone.

Tout le monde sait désormais (sauf peut-être la gauche) que le statu quo (le « ni-ni ») décrété par François Mitterrand - et maintenu par Jacques Chirac - est proprement intenable comme en atteste la dérive structurelle des finances publiques et sociales depuis plus de 25 ans. Les français ont compris qu’il faut désormais laisser les gouvernements appliquer les politiques pour lesquelles ils sont élus. S’ils échouent, les urnes sauront leur faire savoir en temps voulu. Le scrutin d’avant-hier a rappelé que le succès n’est jamais acquis et il n’est en aucun cas un chèque en blanc de la même manière que les échecs ne sont jamais définitifs pour peu que l’on sache en tirer des leçons pour l’avenir, et non des rancoeurs stériles.

 

Jean-Louis Caccomo,

http://caccomo.blogspot.com/

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M
Les syndicats étudiants Unef et Fage, ainsi que la CGT, ont quitté vendredi la séance du Conseil national de l'Enseignement supérieur et de la Recherche (Cneser), qui examine depuis sept heures le projet de loi sur l'autonomie des universités défendu par Valérie Pécresse. Ils veulent protester contre "un semblant" de dialogue. Valérie Pécresse  "a refusé nos amendements sur la composition des conseils d'administration et sur le caractère optionnel de l'autonomie budgétaire et de gestion des ressources humaines, on n'attend même pas pour la sélection à l'entrée du master", explique le président de l'Unef Bruno Julliard, qui "en appelle au président de la République pour trouver une issue à ce qui s'annonce comme une crise grave pour l'université française"Le refus de la discussion des syndicats de gauche est proprement scandaleux....Sous pretexte que tous leurs amendements ne sont pas acceptés ils refusent de poursuivre la discussion.....Les choses sont difficiles en France....
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M
Une excellente nouvelle....Jean-Marie Bockel entre au gouvernement, comme secrétaire d'Etat auprès de Kouchner......... J'en suis très heureux.....Très heureux aussi d'avoir  pu déjà le féliciter.....
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M
OK.....On aura le temps de commenter  le nouveau gouvernement et sans doute une bonne nouvelle.....
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B
Départ retardé, encore 3 j....Classique, le besoin médical d'analyses; à condition de ne pas escaccomoter systèmatiquement une vérité tjrs fuyante derrière des tonneaux d'idéologie et d'humeur.    jmb
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M
Tiens, Bouquery, tu nous avais annoncé ton silence jusqu'à l'automne....La traversée du desert n'a pas été trop difficile?.....Heureux en tous cas de retouver tes commentaires (toujours incisifs) et j'espère tes analyses (plus rares....). 
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