Construire une nouvelle perspective à gauche

Publié le par Bernard Poignant....et autres PS

Une analyse de quelques responsables du PS, que je ne partage pas   .....mais cet effort de réflexion m' a semblé mériter une publication et peut-être un débat.....Je le publie en plusieurs fois... 



Venant de diverses sensibilités au sein du Parti Socialiste, nous avons ressenti le besoin de réfléchir ensemble à ce que nous venons de vivre à l’occasion de l’élection présidentielle et, plus largement, depuis 2002.
Nous vous invitons à vous saisir de ces premières réflexions, à en débattre et à les nourrir.

 

Kader ARIF, parlementaire européen, Jean-Pierre CAFFET, sénateur, Marie-Arlette CARLOTTI, parlementaire européenne, Francis CHOUAT, vice-président du Conseil général de l’Essonne, Guy DELCOURT, député, Harlem DESIR, parlementaire européen, Laurence DUMONT, députée, Catherine GENISSON, députée, Adeline HAZAN, parlementaire européenne, Anne HIDALGO, première adjointe au maire de Paris, François LAMY, député, Annick LEPETIT, députée, Bernard POIGNANT, parlementaire européen, Clotilde VALTER, conseillère générale du Calvados.

 

Au terme d’une période électorale intense, marquée par une mobilisation civique exceptionnelle à l’élection présidentielle, notre pays entre dans une phase nouvelle.

 

Les socialistes l’abordent à la suite d’une défaite à l’élection présidentielle accompagnée d’un résultat historiquement bas de toute la gauche, heureusement atténué par un résultat au deuxième tour de l’élection législative meilleur qu’annoncé.

 

Le Parti socialiste a décidé d’engager, dès à présent, un vaste processus de travail collectif qui trouvera son terme lors du prochain congrès fixé après les élections municipales. Nous nous inscrivons dans ce calendrier et dans ce rythme démocratique. C’est en effet celui qui convient pour donner à la réflexion des socialistes, de leurs alliés et de tous ceux qui voudront s’investir dans ce processus, le temps et la profondeur nécessaires pour traiter les grandes questions en débat.

 

Nous entendons y contribuer en respectant les instances de notre parti et tous les militants socialistes. Leur engagement et leur dévouement ont été exemplaires pendant cette période électorale. Sans eux, à coup sûr, la défaite aurait été plus cuisante encore. Depuis la désignation de Ségolène Royal, le 16 novembre 2006, avec eux, nous n’avons pas ménagé notre mobilisation, malgré les conditions difficiles d’organisation de la campagne présidentielle. Après le 6 mai, nous nous sommes refusés à tout commentaire sur la défaite qui aurait pu ajouter du trouble et de la démobilisation à la déception et à l’amertume alors que nous étions en campagne législative.

 

Maintenant que le travail d’analyse, d’explication et de construction de l’avenir peut s’engager, nous invitons l’ensemble des socialistes à s’y investir. C’est parmi eux, sans structure extérieure ou parallèle mais au cœur du Parti socialiste, que nous voulons faire part de nos réflexions et de nos suggestions, en refusant les règlements de compte personnels et les auto-proclamations de leadership pour 2012.

 

Notre conviction est que le Parti socialiste a besoin d’une profonde refondation comme à d’autres moments de son histoire. Mais il ne part pas de rien et, malgré la défaite, il ne sort pas exsangue de cette longue phase électorale. Nous sommes la principale force motrice de l’opposition et nous disposons de nombreux points d’appui dans les régions, les départements et les communes. Notre influence à l’Assemblée nationale est aujourd’hui renforcée par rapport à 2002. C’est le signe tangible que le Président de la République et sa majorité n’ont pas un boulevard devant eux. Si les Français ont porté le candidat Sarkozy à la présidence de la République, ils viennent également de fixer des limites à sa volonté d’hégémonie. Ils ne sont pas disposés à tout accepter et ils souhaitent que nous soyons en mesure de jouer pleinement notre rôle d’opposition : ferme, utile, intelligente et inventive pour préparer l’avenir.

 

Le deuxième tour de l’élection législative a montré qu’une confrontation plus claire sur le bilan et le projet de la droite sortante et une campagne présidentielle marquant plus nettement le clivage gauche/droite entre deux visions de la société et de la politique auraient pu créer une autre dynamique et, peut-être, dessiner un autre résultat.

 

 

Tirer les enseignements politiques de la campagne présidentielle

 

 L’ampleur de la victoire de Nicolas Sarkozy, le succès des thèmes sur lesquels il l’a construite, renvoient le Parti socialiste à des questions idéologiques, politiques et programmatiques qu’il ne peut plus désormais éluder. Certaines d’entre elles seront abordées dans cette première contribution au débat.

 Mais pour comprendre notre défaite et surtout pour en tirer des enseignements utiles pour l’avenir, il faut commencer par passer au crible ce qui s’est passé pour en arriver là.

Le moins que l’on puisse dire est que la défaite ne s’apparente pas à une chronique annoncée.

 

L’élection présidentielle vient au terme du quinquennat de Jacques Chirac marqué par des crises aiguës qui ont secoué le pouvoir et témoigné de son rejet massif. Ce quinquennat a également été marqué par trois victoires éclatantes pour les socialistes et pour toute la gauche en 2004 (régionales, cantonales et européennes). Un quinquennat, enfin, dans lequel le candidat UMP a tenu, quasiment du premier au dernier jour, le rôle de numéro deux d’un gouvernement impopulaire et de numéro un du principal parti de la majorité. Un candidat dépeint par nous-mêmes comme inquiétant pour les Français et dangereux pour le pays.

 

Rarement depuis 20 ans nous n’avions connu une situation aussi favorable pour traduire dans les urnes la volonté de changement du peuple. Ni en 1995 où, après le puissant rejet dont nous avons été l’objet en 1993, les Français n’étaient pas disposés à un troisième septennat socialiste. Ni même en 2002 où malgré la victoire de 1997 qui a permis à la gauche d’engager des réformes importantes, celle-ci n’a pas su convaincre nos concitoyens de la nécessité d’une nouvelle étape, l’éclatement de la gauche plurielle empêchant la qualification de notre candidat au second tour.

 

En 2007, l’enjeu de l’alternance était clair et les conditions politiques pour la réussir étaient plus favorables. La droite détient tous les pouvoirs. La gauche est moins dispersée qu’en 2002 puisque le PRG et le MRC ont soutenu notre candidate dès le premier tour. Celle-ci a disposé d’un vote massif des socialistes pour sa désignation. C’était un tremplin susceptible de rassembler et de créer une forte dynamique. Enfin, le refus de revivre un nouveau 21 avril 2002, omniprésent dans l’électorat de gauche, a constitué un puissant ressort de vote utile pour orienter dès le premier tour des millions de voix d’électeurs autres que socialistes sur le vote Ségolène Royal.

 

C’est à l’aune de cette situation qu’il faut apprécier le résultat du 22 avril 2007.

 

Disons-le nettement, il n’est pas bon. La candidate socialiste s’est qualifiée pour le second tour, mais la gauche est au plus bas (37%), en dessous même de son score de 2002 (42%). Et nombre d’électeurs de gauche, y compris socialistes, ont préféré François Bayrou à Ségolène Royal.

 

Il est d’autant moins bon que dans le contexte d’une mobilisation record, le candidat UMP, pourtant lesté par le bilan de la droite et par son image, vire largement en tête au premier tour et maintient intégralement son avance au second grâce à, ou malgré, une campagne très agressive et radicalisée.

 

Un tel renversement de situation en quelques mois (de novembre 2006 à avril 2007) mérite que l’on débatte de ce qui n’a pas fonctionné et de ce qui s’est enrayé.

 

Faisons-le franchement, tranquillement, collectivement, car il ne sert à rien de nier la réalité en transformant un score de 46,9% en quasi-victoire et d’occulter des points majeurs de débat. C'est la seule façon de porter collectivement la responsabilité de l'échec pour mieux en tirer toutes les conséquences.

 

Nous en suggérons quelques-uns.

 

La vie et le fonctionnement collectifs du Parti socialiste depuis 5 ans. Les efforts déployés depuis 5 ans pour rassembler les socialistes après le 21 avril 2002 n’ont pas été accompagnés du travail nécessaire pour concentrer les énergies sur la préparation de l’alternative de 2007.  Beaucoup de temps, trop de temps, a été consacré à des enjeux internes de leadership.

 Après le Congrès de Dijon de 2003 qui a permis d’aller de l’avant, les élections du printemps 2004 ne nous ont-elles pas conforté dans l’idée que l’alternance était en marche, presque mécaniquement ? Et comment avons-nous interprété, dans ce relatif attentisme, les 60% obtenus par la majorité du parti au référendum interne du 19 décembre 2004 ? Car les 55% de NON au référendum du 29 mai 2005 n’auront pas seulement révélé l’ampleur du mécontentement populaire contre Chirac, contre le cours pris par l’Europe et la défiance à l’égard des forces politiques de gouvernement. Ils auront aussi creusé une cruelle division des socialistes que nous avons mis 6 mois à réduire, vaille que vaille, avec le congrès du Mans de novembre 2005, au risque de la confusion et de l’incohérence.

 

Ce n’est qu’à partir de 2006, dans ces conditions difficiles, que nous commençons à nous préparer vraiment à l’échéance présidentielle. Mais comment le faisons-nous, sinon en sur-valorisant les positionnements personnels sur les enjeux de fond ?

 

Les conditions de désignation de notre candidate. Ce fut considéré comme un grand moment de démocratie. Mais n’aurions-nous pas dû nous saisir de cette période-clé pour construire l’adéquation entre le projet et le candidat ? De quel poids a pesé, à l’inverse, l’opinion selon laquelle l’essentiel était ailleurs : choisir celle présentée comme la seule capable de battre Nicolas Sarkozy parce qu’avant tout elle incarnait le renouvellement ? Il faudra d’ailleurs s’interroger sur ces primaires et sur le système d’adhésions qui les ont accompagnées.

 

  • Le rapport au Parti socialiste. Il n’a pas été de bonne qualité. Le parti a été présenté comme une structure gênante parce que sclérosée, une sorte de « boulet ». Autant s’en affranchir au maximum ! Après l’âpre compétition interne, il eût mieux valu, au contraire, tout faire pour rassembler, pour impliquer tous les responsables et les instances de direction, bref, aimer être la candidate des socialistes. De son côté Nicolas Sarkozy a entraîné l’UMP. Il l’a fait travailler ; il l’a rassemblé. De ce point de vue, sa victoire est aussi celle de son parti. Curieux renversement de tradition où c’est le candidat de la droite qui fonde sa victoire sur la force d’un parti et c’est la candidate de la gauche qui la craint ! Ce n’est pas l’autonomie de Ségolène Royal pendant la campagne qui est ici en cause, encore moins les intuitions et la ténacité dont elle a su faire preuve pour capter les attentes populaires sur les questions du travail, de l’ordre ou de la République par exemple. Mais après avoir affirmé : « mon projet est socialiste », sa volonté, ensuite, de se détacher  du collectif socialiste a singulièrement brouillé les cartes pour de nombreux électeurs et a trop souvent conduit à des improvisations et à des hésitations qui ont introduit un doute dans l’opinion sur la « présidentialité » de Ségolène Royal. Une enquête a d’ailleurs montré que 71% de ceux qui ont voté pour Nicolas Sarkozy l'ont fait par adhésion à son projet contre 55% seulement pour la candidate socialiste.

 

  • La dénonciation insuffisante du bilan de la droite et l’absence d’une réelle  confrontation gauche/droite. Les moments pendant lesquels a été pointée la politique du gouvernement sur les sujets-clés de la croissance, de la dette, du bouclier fiscal, de la précarité au travail (CPE), de la sécurité, ont été trop rares. Ceci a contribué à exonérer le candidat UMP de sa responsabilité dans le bilan du quinquennat et du même coup, a renforcé indirectement sa crédibilité politique avec une campagne sur le thème de la rupture. C’est sur ce registre que la confrontation entre la gauche et la droite aurait dû être plus approfondie et mieux mise en avant. Il aurait fallu montrer avec beaucoup plus de force les profondes différences existant entre le projet de société de Nicolas Sarkozy (sur lequel nous reviendrons) et le nôtre, en s’appuyant également sur le bilan des années 1997-2002 pour puiser dans nos réussites (sur la croissance, la réduction de la dette et des déficits, les créations d’emplois) et pour tirer leçon de nos échecs (sur le pouvoir d’achat ou sur la difficulté à contrer la campagne de la droite sur la sécurité, par exemple). Cette démarche aurait donné de la cohérence politique à nos propositions, notamment sur les plans économique et social. La bataille de la crédibilité s’est aussi jouée à ce niveau dans l’opinion. En réalité tout s’est passé comme si la stratégie de la campagne s’était résumée à assurer la présence au second tour, puis, pour celui-ci, à compter d’abord sur le réflexe anti-Sarkozy. La preuve est faite que c’était insuffisant pour gagner.

 

  • La stratégie de rassemblement pour le second tour et le rapport à F. Bayrou. A deux jours du premier tour, François Bayrou était encore décrit comme l’autre candidat de la droite avec qui rien n’était possible et les rares socialistes qui prônaient ouvertement l’alliance au centre étaient vertement tancés. Le 24 avril, il devenait un partenaire stratégique voire un éventuel Premier ministre ! Ce changement de pied, sans délibération avec le Parti socialiste et les autres formations de gauche, réitéré de surcroît entre les deux tours de l’élection législative, aura accentué le trouble sur la cohérence et sur la clarté du projet politique de la gauche.

 

Mais c’est surtout et avant tout sur le fond des enjeux de cette élection présidentielle que nous sommes apparus en retard dans notre analyse de l’état du monde, de la société française, des attentes des citoyens, en nous montrant incapables de les concrétiser dans un corps de propositions suffisamment crédibles. Au point que c’est le candidat d’une droite au bilan impopulaire qui est apparu comme un homme neuf et qui est  parvenu à ôter à la gauche le drapeau du changement et de la rupture et à nous accoler celui du conservatisme et de l’immobilisme !

 

C’est à ce travail d’analyse qu’il faut maintenant s’atteler et auquel nous entendons contribuer.....

A suivre......

Publié dans Réflexion politique

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B
Je passe par là et je lis: ".....creusé une cruelle division......6 mois;....."mes fesses ! /.....plâtré une affreuse indivision,..... pour protéger quel héritage ? Il faudra bien 6 ans pour se remettre de ce rétro-virus. Le principal résultat électoral (statistique) de l'année est l'écrabouillement des nonistes de tous bords. L'ouverture est le cordon cicatriciel du ouisme déchiré. Le message commun Sego-Sarko c'est que l'Europe est notre seul lieu de résolution entre peuple de nos territoires et forces a-patrides. Bon, Ciao? en attendant que notre porteur de cierges soit réveiilé.         jmb
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M
Jack Lang propose, sur RTL, une "démission collective" de la direction socialiste afin de "revenir devant les militants au lieu de rejouer le mécano de chefferies". Il invite également tous les socialistes à "l'autocritique". (Avec lefigaro.fr). 
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