L'abbé Pierre et la politique
Il n’est pas facile de résumer la vie humble et lumineuse de l’Abbé Pierre. Ce qui le caractérise, c’est que dans tous les domaines il aura été jusqu’au bout de l’engagement possible. Homme de religion c’est d’abord dans la règle monastique la plus exigeante qu’il commence son ministère. Résistant, il prendra tous les risques pour apporter son aide et sauver des vies.
Engagé en politique, il devient tout de suite député, d’abord au groupe MRP puis à
Son intelligence, son courage et son sens politique auraient sans doute pu le conduire aux plus hautes fonctions, mais, révolté par la souffrance des hommes, il choisit de mettre son énergie et son talent aux services des plus démunis.
Aujourd’hui les politiques de droite et de gauche s’efforcent de récupérer son message, c’est d’ailleurs le plus bel hommage que l’on puisse lui rendre.
L’abbé Pierre même s’il n’est pas resté très longtemps un professionnel de la politique s’y est toujours intéressé et s’est toujours adressé aux politiques.
Quelques leçons sont à tirer de son exemple.
La première c’est que la politique n’est pas une fin en soi, elle n’est qu’un moyen pour atteindre des objectifs au service de tous. On a parfois l’impression que la classe politique tourne sur elle-même et oublie ce point essentiel.
La deuxième c’est que l’on ne peut se passer de la politique et que pour transformer ou améliorer les choses il faut passer par l’action politique. Tout au long de sa longue vie, l’abbé Pierre a été à la fois craint et courtisé par les politiques. Il a su jouer de cela avec habilité pour obtenir les moyens nécessaires à son action et faire évoluer la loi dans l’intérêt des plus pauvres.
La troisième leçon réside dans sa capacité à démonter que l’on peut trouver un consensus national sur de grands sujets et dépasser le clivage Droite / Gauche. Lors de son « insurrection » de l’hiver 54, il a obtenu un vote unanime de l’Assemblée pour interdire les expulsions en période hivernale.
La quatrième leçon va au-delà de l’action politique traditionnelle, c’est la capacité qu’il a démontré de rendre leur dignité aux plus démunis en en faisant des acteurs de leur insertion et non pas des assistés spectateurs de l’engagement des autres. Au-delà de l’appel à la solidarité, le combat de l’abbé Pierre a été un combat pour la responsabilité et donc pour la dignité de chacun. N’est-ce pas ce combat qu’il faut poursuivre pour faire de la politique autre chose qu’un spectacle ?
Marc d’Héré et Gilles Norroy